Avec Coup du sort, Marc Falvo et Bertrand B. livrent un roman audacieux, publié aux éditions Faute de frappe, qui bouscule les conventions littéraires. Ce livre propose une double expérience narrative : deux auteurs, deux styles, deux intrigues, mais une œuvre unique qui surprend par son originalité et sa complémentarité.
Le roman est structuré autour de deux histoires bien distinctes, alternant de chapitre en chapitre. Chaque auteur prend la plume à tour de rôle, ce qui donne au lecteur l’impression de naviguer entre deux univers aux tonalités différentes.
Du côté de Bertrand B., les descriptions minutieuses plongent le lecteur dans une atmosphère étrange où les éléments les plus anodins prennent une importance capitale. Quelques passages absurdes viennent troubler nos repères habituels, rendant l’expérience à la fois déconcertante et fascinante. Les mots, soigneusement choisis, créent des images surprenantes qui stimulent l’imagination du lecteur.
Marc Falvo, quant à lui, joue sur un mélange subtil de fiction et de parenthèses autobiographiques. Sans tomber dans l’autofiction, son écriture flirte avec des thématiques personnelles et des codes romanesques qu’il n’hésite pas à déconstruire pour mieux les réinventer. Ces allers-retours entre le vraisemblable et l’invention renforcent l’immersion dans son récit.
Les intrigues elles-mêmes jouent avec les attentes des lecteurs, qui tentent d’en percer les mystères avant d’accepter leur rôle de spectateur.
La première intrigue nous plonge dans l’univers étrange d’un groupe de joueurs de cartes qui se retrouvent dans des lieux inhabituels, comme un tripot clandestin. Les participants, affublés de surnoms énigmatiques, inventent des règles mystérieuses que le lecteur n’a pas besoin de comprendre pour apprécier l’étrangeté de l’ensemble. Mais un nouvel élément vient perturber cette mécanique : l’absence de "N", remplacé par "F", un personnage énigmatique dont personne ne sait rien. Cette tension latente fait vibrer chaque page, renforçant l’atmosphère intrigante.
La seconde intrigue, plus intime, met en scène un écrivain qui croise le chemin d’une femme en panne sous son balcon. Sans qu’il sache pourquoi, il se sent obligé de l’aider. Elle repart, promet de revenir, et laisse planer un mystère : tiendra-t-elle parole ? Cette histoire, bien que plus réaliste, joue également sur le suspense et sur les émotions complexes de ses personnages.
Malgré leurs différences stylistiques, les deux auteurs parviennent à une osmose remarquable. L’alternance des chapitres ne nuit pas à la fluidité de la lecture, bien au contraire : elle devient une force, un jeu littéraire qui capte l’attention et maintient un rythme engageant. Si le passage d’une intrigue à l’autre peut dérouter dans les premiers chapitres, le lecteur s’adapte rapidement et se laisse porter par la richesse narrative de chaque univers.
Le mariage des deux styles est également une réussite esthétique. Bertrand B. joue avec les mots et les détails, créant des scènes où l’étrange vient perturber le quotidien. Marc Falvo, de son côté, injecte dans son récit une profondeur émotionnelle et un jeu constant entre authenticité et fiction. Cette complémentarité rend l’expérience de lecture unique.
Malheureusement, Coup du sort n’est plus disponible à l’achat. Cela ajoute une certaine aura à ce livre déjà singulier, devenu presque mythique pour ceux qui l’ont lu. Pour les amateurs de récits audacieux, où la forme et le fond se répondent avec intelligence, Coup du sort est une pépite qui mériterait une réédition.
Marc Falvo et Bertrand B. signent avec Coup du sort un roman à deux voix qui bouscule les attentes, mêle ironie et mystère, et offre une expérience de lecture riche et immersive. Que vous soyez intrigué par la singularité des intrigues ou par la rencontre des deux styles, ce livre saura vous surprendre et vous captiver. Prenez le risque : laissez-vous emporter par le coup du sort… si vous parvenez à mettre la main dessus !